Benedicte Bach
A propos
Après avoir emprunté des chemins de traverses, je me concentre sur la route, parfois escarpée et sinueuse, de l’expression artistique. Peu encline à réduire mon horizon, je développe une pratique polymorphe (photographie, vidéo, écriture, installation ou performance) : le choix d’un médium ne prenant sens que dans la résonnance avec le discours porté, dans l’écho donné à la narration construite.
Très sensible à la poésie du monde souvent invisibilisée dans la frénésie du quotidien, ma recherche consiste à ouvrir des pistes à partir des détails glanés comme des indices pour donner de la voix à cet univers délicat et fragile. Une poétique du détail que je traduis d’abord en mots avant d’en donner une projection plus plastique. Au départ, il y a toujours une histoire, souvent à tiroirs, une narration qui ouvre vers l’imaginaire - pour un appel d’air, une respiration - une mise à jour de cet imperceptible qui nous entoure comme autant de trésors à conserver précieusement.
Cette démarche - où les mots, matière première brute, sont travaillés, malaxés, façonnés - s’inscrit dans une temporalité particulière et relative. Pour faire émerger le sensible, il faut prendre le temps d’observer, de s’immerger, de se laisser imprégner. Le temps, dans sa linéarité comme dans sa cyclicité, doit être bousculé voire arrêté. Il s’efface pour nous laisser rentrer au cœur même de la matière et en révéler les processus de transformation. La malléabilité de la réalité, à partir de ce prisme particulier, ouvre ainsi des bulles de poésie qui élargissent nos horizons. La matérialité du réel n’a d’intérêt que pour ses interstices desquels émergent des fragments de vie, d’émotions, de sensations que je saisis dans mon filet à papillons.
Un filet que je laisse volontiers dériver dans mon environnement intime comme dans des univers a priori éloignés de la poésie. L’industrie est ainsi un terrain de jeux que j’affectionne. Il peut sembler de prime abord oxymorique de placer côte à côte poésie et industrie. En réalité, il n’en est rien. « L’industrie n’a pas tué la poésie, elle lui ouvre un monde nouveau » comme l’écrit Kauffmann en 1853.
C’est dans cette dimension hors du temps, entre mue et métamorphose, que je navigue au fil des mots sur un océan actanciel dont les vagues déposent sur le rivage du quotidien des histoires à écrire à fleur de peau ou sur du papier de soi[e].
Très sensible à la poésie du monde souvent invisibilisée dans la frénésie du quotidien, ma recherche consiste à ouvrir des pistes à partir des détails glanés comme des indices pour donner de la voix à cet univers délicat et fragile. Une poétique du détail que je traduis d’abord en mots avant d’en donner une projection plus plastique. Au départ, il y a toujours une histoire, souvent à tiroirs, une narration qui ouvre vers l’imaginaire - pour un appel d’air, une respiration - une mise à jour de cet imperceptible qui nous entoure comme autant de trésors à conserver précieusement.
Cette démarche - où les mots, matière première brute, sont travaillés, malaxés, façonnés - s’inscrit dans une temporalité particulière et relative. Pour faire émerger le sensible, il faut prendre le temps d’observer, de s’immerger, de se laisser imprégner. Le temps, dans sa linéarité comme dans sa cyclicité, doit être bousculé voire arrêté. Il s’efface pour nous laisser rentrer au cœur même de la matière et en révéler les processus de transformation. La malléabilité de la réalité, à partir de ce prisme particulier, ouvre ainsi des bulles de poésie qui élargissent nos horizons. La matérialité du réel n’a d’intérêt que pour ses interstices desquels émergent des fragments de vie, d’émotions, de sensations que je saisis dans mon filet à papillons.
Un filet que je laisse volontiers dériver dans mon environnement intime comme dans des univers a priori éloignés de la poésie. L’industrie est ainsi un terrain de jeux que j’affectionne. Il peut sembler de prime abord oxymorique de placer côte à côte poésie et industrie. En réalité, il n’en est rien. « L’industrie n’a pas tué la poésie, elle lui ouvre un monde nouveau » comme l’écrit Kauffmann en 1853.
C’est dans cette dimension hors du temps, entre mue et métamorphose, que je navigue au fil des mots sur un océan actanciel dont les vagues déposent sur le rivage du quotidien des histoires à écrire à fleur de peau ou sur du papier de soi[e].
Bénédicte Bach raconte des histoires.
Le travail de Bénédicte Bach a depuis le début fixé une certaine atemporalité. Une rhétorique poétique construite avec du détail, de l'abstraction, des escapades symboliques pour prendre une tangente face au réel. Le point de départ de la démarche de l'artiste est lié aux mots, à cette syntaxe sémantique, puis l'histoire racontée tisse des liens plastiques, construit un univers photographique, visuel, elliptique, onirique.
Bénédicte aime jouer des matières, suspendre le cours des choses, figer un vol de papillons sur une place dans la ville, en jeter en papier du haut d'une cathédrale, comme une évanescence, en toucher l'essence, le symbole plutôt que la matérialité. Son approche narrative touche par la symbolique, par l'imaginaire emblématique d'un élément facilement identifiable. C'est le point d'entrée.
Qu'il s'agisse de porter aux nues des nuages, de montrer une envolée d'insectes ou de stopper la chute des feuilles, la mécanique est la même, figer le temps. Donner à voir cette subtile mélodie de ce qui va disparaître. La fixer. On voit là évidemment un des enjeux de la photographie, qui permet par magie de capturer un instant qui n'est pas seulement celui décisif. L'artiste ne raconte pas un événement qui se serait produit mais construit son propre imaginaire, donne à voir ce qui résulte de sa poétique du détail, de sa vision symbolique d'un monde. Le réel est trop peu poétique à ses yeux, trop cynique, aux contingences économiques trop prononcées. Le réel ne fait pas rêver.
L'univers de l'auteure est donc volontairement en retrait, faussement candide, il parle également de notre perception du temps. Une syncope de mouvement, un élan fragile, un pas danse. Cette arythmie organique que l'on retrouve aussi dans l'art de jouer des mots, à l'image de ceux écrits sur les papillons, procède de la même logique de faire valser les sonorités, de se libérer de l'allégeance unique de leur sens pour en taquiner les entrailles musicales. Là également, le temps est détaché, étiré, suspendu. Les créations protéiformes qui en résultent procèdent donc d'une même logique.
Benjamin Kiffel
Bénédicte aime jouer des matières, suspendre le cours des choses, figer un vol de papillons sur une place dans la ville, en jeter en papier du haut d'une cathédrale, comme une évanescence, en toucher l'essence, le symbole plutôt que la matérialité. Son approche narrative touche par la symbolique, par l'imaginaire emblématique d'un élément facilement identifiable. C'est le point d'entrée.
Qu'il s'agisse de porter aux nues des nuages, de montrer une envolée d'insectes ou de stopper la chute des feuilles, la mécanique est la même, figer le temps. Donner à voir cette subtile mélodie de ce qui va disparaître. La fixer. On voit là évidemment un des enjeux de la photographie, qui permet par magie de capturer un instant qui n'est pas seulement celui décisif. L'artiste ne raconte pas un événement qui se serait produit mais construit son propre imaginaire, donne à voir ce qui résulte de sa poétique du détail, de sa vision symbolique d'un monde. Le réel est trop peu poétique à ses yeux, trop cynique, aux contingences économiques trop prononcées. Le réel ne fait pas rêver.
L'univers de l'auteure est donc volontairement en retrait, faussement candide, il parle également de notre perception du temps. Une syncope de mouvement, un élan fragile, un pas danse. Cette arythmie organique que l'on retrouve aussi dans l'art de jouer des mots, à l'image de ceux écrits sur les papillons, procède de la même logique de faire valser les sonorités, de se libérer de l'allégeance unique de leur sens pour en taquiner les entrailles musicales. Là également, le temps est détaché, étiré, suspendu. Les créations protéiformes qui en résultent procèdent donc d'une même logique.
Benjamin Kiffel